Ça commence bien !
Article mis en ligne le 16 janvier 2019
dernière modification le 15 janvier 2019

par Claire MOURIER

La fusion de commune est réalisée. La majorité nouvelle s’est distribué les postes et s’est donné les règles qui lui conviennent.

Mais, attendez-vous à savoir que lors de la cérémonie des vœux, le Maire nous a gratifiés d’une harangue d’1h30 de propos divers, mettant en cause les corps constitués et le président de la République à propos de la contestation des gilets jaunes, par une formule vigoureuse : s’ils ne savent pas faire, qu’ils partent, on s’en occupe ! Pour conclure, s’ils (on ne sait pas qui) ne vous conviennent pas, « dégagez-les » !

Ça a le mérite de l’élégance et de l’opportunité, j’avais quitté l’estrade, prise de nausées.
Dans ce contexte, nous militons pour espérer que les mouvements populaires favoriseront l’émergence d’un autre temps associé à d’autres pratiques et à d’autres politiques plus respectueuses des institutions et des personnes qui les servent.

Il revient aux citoyens de s’en saisir, au-delà des sensibilités politiques, pour un peu de dignité et d’espérance, pour le plus grand nombre.

A cet égard, le témoignage en faveur des exclus par Etienne Pinte maire (E.R.) de Versailles, sénateur (E.R.), recevant la médaille de la ville qu’il a acceptée avec simplicité, a rappelé son engagement de toujours auprès des réfugiés et des exclus, afin que la France reste fidèle à ses engagements d’être pour tous les exclus et sans terre, un lieu d’asile et de paix pour se reconstruire.

Décryptage

Lors de la cérémonie des vœux Urbi et Orbi de monsieur le maire du Chesnay-Rocquencourt, celui-ci s’est adonné comme il aime le faire à un propos libre évoquant divers sujets de la vie locale et au-delà.

C’est pourquoi, il convient de rappeler que si l’adage dit que la parole est libre et l’écriture est serve, le discours des élus et des autorités publiques suit lui, les règles précises du protocole républicain, formalisées depuis longtemps, et dont les éléments figurent dans des ouvrages référencés, disponibles en librairie et certainement à la médiathèque de la ville. C’est particulièrement le cas à la faveur de cérémonies officielles telles que les vœux, l’hommage public, les cérémonies républicaines lors des commémorations des grandes dates de notre histoire.

Les lois de la République ont fait évoluer ce protocole afin de l’adapter aux réformes successives que notre pays connait. Ainsi, depuis les lois de décentralisation, des ajouts ont été introduits pour tenir compte de l’expression institutionnelle des autorités territoriales, Régions, Départements, Communes, Intercommunalités, Autorités territoriales.
Aujourd’hui, en principe, à la faveur des cérémonies de vœux, le maire par exemple, s’emploie à dresser un bref bilan de l’action positive conduite dans sa commune et après avoir tracé quelques perspectives sur l’exercice à venir, adresse aux citoyen-ne-s des vœux individuels, collectifs et s’il le juge opportun, il rend hommage aux actions des responsables d’associations, agents de la collectivité, membres du conseil municipal et des instances de délibérations engagés sur le territoire. Enfin, il peut conclure sur un bref propos plus général relatif à une question nationale, pour exprimer des vœux et conclure sur son espoir pour la République et la France.

Le protocole fait également référence aux bons usages, à la courtoisie et à la bienséance. Ainsi, on s’abstiendra d’interpeller des autorités publiques en leur absence, on évitera d’interpeller les femmes ou de les questionner sur leur situation matrimoniale. Les jugements de valeur sur l’action des autorités publiques extérieures au ressort dans et pour lequel la cérémonie est organisée sont bien entendu à proscrire, les interpellés ne pouvant exercer de droit de réponse. Enfin, lorsqu’un élu de la République s’exprime au titre de l’un de ses mandats, il prend soin de ne pas superposer les actions qu’il conduit à un titre ou un autre. Par exemple un maire de commune exerçant des responsabilités de conseiller départemental et/ou de membre d’un conseil d’administration d’un établissement public s’abstiendra d’évoquer des points n’ayant pas trait au mandat au titre duquel il s’exprime. De même s’il exerce une profession, ou s’adonne à des loisirs tels que la voile, le ski, la pêche au gros, ou le macramé, il s’efforcera au silence sur ces sujets, afin de ne pas offenser les personnes qui l’écoutent et n’ont peut-être pas les moyens financiers ou capacités de se livrer à ces activités. Il en est surtout ainsi si dans le même discours on s’interroge sur les moyens de financer le RSA ou l’aide apportée aux sans papier.

Plus particulièrement, les plaisanteries relatives à la jeunesse des demandeuses d’asiles sont à bannir ainsi que les enchainements de propos débutant sur les mineurs réfugiés déboutés de ce statut, supposés abandonnés à l’errance dans nos campagnes, se poursuivant sur des engagements sécuritaires dans la ville en 2019.

Evoquer devant l’assemblée les contestations en cours auprès des autorités de tutelle ou auprès des juridictions compétentes en désignant un membre du conseil municipal est particulièrement déplacé, dès lors que ce n’est pas le lieu d’en débattre et que l’élue concernée ne peut répondre à cette allusion/interpellation.
Enfin, conclure sur la phrase : « ceux qui travaillent pour que ça n’aille pas bien, on leur dit : Dégagez ! » n’a pas sa place dans une cérémonie de vœux, c’est gratuitement agressif et met en cause sans les nommer des personnes, des élus, des agents, des autorités publiques ! C’est injurieux.

Claire Mourier, conseillère municipale.